Voyages extraordinaires
Voici le court récit d’un voyage extraordinaire, en un pays qui ne l’est pas moins. Dépaysement garanti, valant bien les histoires de notre Jules Verne.
C’est un territoire bien sympathique, peuplé d’irréductibles habitants qui résistent encore et toujours à l’envahisseur (numérique).
L’agent de voyage m’avait averti. En Akinézie, 87 % des chefs d’entreprise (de PME et ETI) n’affichent pas la transformation numérique comme une priorité.
Mais comme ces rues pavées, ces vieilles maisons chargées d’histoire, sont charmantes, on se prête à l’idée que rien n’a bougé depuis des lustres. Le chauffeur de taxi est bavard, il me confirme que 47 % des dirigeants d’entreprise estiment que l'impact de la révolution digitale ne sera pas majeur sur leur activité d'ici 5 ans.
Dans quel endroit singulier suis-je donc tombé pour mes vacances !
Encore surpris, je me renseigne auprès du réceptionniste de l’hôtel. Me tendant la clef, il m’assure que 20 % des chefs d’entreprise considèrent que le temps de la transformation digitale n'est pas venu pour eux. Le guide de voyage (Bpifrance) déclare d’ailleurs à ce sujet « qu’une entreprise sur cinq est donc condamnée à disparaître si elle ne fait rien d'ici trois ans ».
Le premier soir, attablé devant un merveilleux repas (qu’est-ce qu’on mange bien dans ce pays), je médite devant une mention, au bas du menu, qui a retenu mon attention : 88 % n’ont pas intégré le numérique dans un plan de formation dédié.
Allons donc, il doit bien y avoir ici des entreprises qui savent où elles vont ! Au petit matin, j’interroge ainsi le serveur, entre croissant et tartine beurrée (et confiture de fraise maison). Lequel me répond du tac au tac : même parmi ceux qui déclarent avoir une vision de la transformation numérique de leur entreprise, 63 % n’ont pas de feuille de route. On y va donc au petit bonheur la chance.
Il y a brocante au village aujourd’hui. Tout en farfouillant au hasard sur un stand de livres écornés, je susurre, à mi-voix, que les projets pourraient aussi être portés par les salariés. Mais le vendeur, apparemment très au fait, me répond que seuls 25 % des dirigeants associent leurs équipes opérationnelles à leurs projets de transformation.
Quelles peuvent donc être les causes de cette défiance de ces dirigeants à l’égard du digital ? J’en découvre les motifs dans la brochure touristique à l’accueil de l’hôtel. Par ordre décroissant : la complexité, le manque de compétences en interne, le coût, la résistance au changement en interne. Je ne peux m’empêcher de penser que si les causes sont identifiées, il est bien de la responsabilité de chaque chef d’entreprise d’y pallier, non ?
Au terme de cet exotique voyage en Akinézie, je me dis qu’Usbek, Candide et Ulysse n’ont pas fait pérégrinations plus étonnantes…
Sic transit mundi.